Positionnement de la Haute-Saône en France

Positionnement en Haute-Saône des lieux cités

Extraits de la lettre du vendredi 4 avril 1941

"Ta lettre que j'ai reçue hier matin et la visite de l'après-midi, je n'attendais pas ni l'un ni l'autre, m'ont apporté un peu de réconfort dans la vie sombre et froide de la prison.
J'ai déjà eu des journées bien paisibles mais celles-ci sont les plus tristes de mon existence, et si Dieu permet que je rentre un jour auprès de vous, je le prierai bien à genoux pour lui demander de vivre encore quelque temps pour vous aimer et de vous chérir bien encore davantage.
Tu m'as demandé chère femme l'état de mon doigt et de l'entorse que je m'étais fait avant de te quitter, tout cela n'est rien, de simples bobos, mais j'ai eu une crise d'asthme la première nuit que j'ai couché à Vesoul qui m'a duré 6 heures, il y a un gardien qui m'a apporté des cachets pour me calmer mais ce n'était pas cela qui me fallait, et encore que sont les souffrances physiques après des souffrances morales ?"

Extraits de la lettre du mardi 8 avril 1941

"Tout cela vous fait beaucoup d'ouvrage, mes pauvres enfants, mais je ne doute pas de votre bon vouloir et de votre courage. Un jour viendra où vous serez récompensé de vos peines.
C'est à toi, Louis, que je donne la direction des travaux de l'exploitation, après consultation en commun ; Tes frères et sœurs te devront obéissance et tous vous obéirez à votre mère comme à moi-même.
Je désirerais de mon grand cœur Louis que tu n'ailles plus jouer pour le moment car s'il t'arrivait un accident, vois ce qu'il en résulterait chez nous. Le travail en souffrirait immédiatement.
Je ne veux pas non plus que vous vous serviez de la moter-vélo car vous n'avez pas l'autorisation."

Notes : Louis jouait au football / le terme "moter-vélo" est peu lisible, il est donc peut-être inexact...

Extraits de la lettre du dimanche 20 avril 1941

"J'ai passé une bonne nuit et comme chacun je dis ma prière, je prends ensuite ma potion, je balaie ma carrée, ou plutôt elle est rectangulaire avec 5 mètres de longueur 1m50 de largeur et 3 m de hauteur en voute arrondie comme une chapelle sans rebord ni quoi que ce soit aux murs, de peur qu'on ne se pende sans doute (pour moi, ils n'ont pas besoin de crainte je n'ai jamais pensé à mettre fin à mes jours) une porte droite 50 cm de largeur 2 m haut , fenêtre également de 0m50 largeur et 1m50 hauteur avec barreaux de fer et masquée en tôle devant, ce qui ne représente comme lumière qu'un petit carré en haut de 0m50 de côté, c'est pourquoi c'est toujours sombre et avec cela exposé en plein nord.
Mais passons, ensuite soins de toilette au lavabo avec eau chaude 10 minutes, j'en profite pour bien me laver les pieds 2 ou trois fois quand l'eau est bien chaude, et je fais doucir ma tisane en mettant la bouteille dans mon seau hygiénique que j'ai bien soin de laver comme il faut chaque jour /.../ je termine ma toilette en passant mon torchon sur mes cheveux, et mes doigts me servent de brosse à dents."

Extraits de la lettre du jeudi 24 avril 1941

"Chère Marthe, je suis encore à me demander comment tu as fait pour amener nos deux petites poupées chéries ! Quelle surprise pour moi en voyant entrer dans ma cellule Lulu portée par le soldat allemand et Anne-Marie tenue par la main, elles ont commencé à ouvrir de grands yeux, me reconnaissant à peine, vu la chambre un peu sombre, et enfin la Lulu m'a souri et je l'ai embrassée, Anne était toute émue avec envie de pleurer, puis elle s'est jetée dans mes bras en m'embrassant. Je n'ai pas pu retenir des larmes de joie en les voyant. Voici un mois que je vous ai quitté, c'est peu mais je les ai trouvées grandies. Pendant le temps que je me suis changé de linge elles se sont tout de suite amusées avec les livres et quelques bibelots.
Je croyais pouvoir te voir aussi car sans doute tu n'es pas venue seule avec ces enfants-là ? Tu n'as pas pu avoir la permission et c'est bien regrettable ma pauvre chérie, mais que veux-tu c'est le règlement."

Extraits de la lettre du lundi 28 avril 1941

"Hier dimanche, je ne vous ai pas écrit, étant resté en prières une grande partie de la journée, j'ai voulu être constamment avec Dieu, afin de lui recommander mon âme, mais surtout le supplier de vous avoir toi ma chère et nos enfants sous sa bonne garde.
Je veux, entends-tu, ma femme, que tu sois courageuse, et il faut surmonter cette épreuve pour élever nos petits qui, sans toi, deviendraient des pauvres malheureux.
Tu sais, ma chérie, je n'ai pas peur de la mort, et d'autant plus que je ne suis pas coupable. Dieu seul était témoin et lui seul me jugera. Et puis je suis déjà vieux et malade. Il est certain que j'aurais été mieux auprès de vous tous pour vous quitter, ce n'était pas cela que nous voulions après avoir eu, toi surtout ma sainte femme, une vie de bonheur pour élever une telle famille et moi un labeur acharné, pour ainsi dire nuit et jour sans trêve ni repos pour arriver à un résultat afin de procurer à nos enfants un petit pécule pour les orienter dans cette vie si possible. Mais que veux-tu, c'est le destin, rejoignons-nous en bon chrétiens. Et un jour viendra où nous nous retrouvons là-haut pour ne plus nous séparer."

Extraits de la lettre du lundi 5 mai 1941

"Hier dimanche il a plu presque toute la journée et aujourd'hui voilà le beau soleil qui ne durera peut-être pas la journée à ce qu'il me semble depuis ma prison.
Comme par enchantement je passe des nuits merveilleuses, je ne souviens pas d'en avoir passé de semblables, je n'étouffe plus du tout, Dieu est venu à mon aide, et je l'en remercie du fond de mon cœur en lui renouvelant souvent mes prières, et à vous aussi mes bien chers tous, femme chérie de mon cœur, mes pauvres enfants, je prie pour vous afin que Dieu vous envoie une vie meilleure.
Aimez-vous bien mes enfants les uns les autres, ne vous querellez point, n'ayez même pas une pensée mauvaise l'un envers l'autre et je ne veux que jamais, entendez-vous jamais, vous ne soyez en désaccord, surtout dans vos partages, qui seront faits d'une façon loyale.
Et surtout aimez votre mère par-dessus tout, dorlotez la, embrassez la, elle aura tant besoin de votre amour, de vos petits soins et de vos caresses.
Votre père qui vous aime et qui veillera sur vous et qui vous embrasse du fond de son cœur.
Au-revoir, ma femme chérie, reçois de ton homme qui t'aime ses plus tendres baisers d'amour."


Le Sabot de Frotey

Le lieu dit "Combe Freteuille" à Frotey Les Vesoul, de nos jours


Vanne, de nos jours


La Saône vers le moulin de Soing, de nos jours